La BAF fait chanter les fournisseurs d’accès pour étendre la censure d’Internet
Bruxelles, le 5 décembre 2011 - Afin d’étendre encore la censure du réseau pour servir ses intérêts, la Belgian Anti-piracy Federation n’hésite pas à recourir au chantage et aux lettres de menaces envers les fournisseurs d’accès à Internet, au mépris de toute procédure judiciaire. Nouvelle escalade de l’industrie du divertissement vers un statut autoproclamé de « police privée » d’Internet… Nous publions l’un de ces documents accablants.
Le 26 septembre dernier, la cour d’appel d’Anvers rendait sa décision dans le cas opposant la BAF aux fournisseurs d’accès à Internet Belgacom et Telenet. La cour imposait alors à ces deux opérateurs la mise en place d’un blocage de onze adresses associées au site The Pirate Bay. Nous avions expliqué l’incohérence de la décision rendue et les risques que celle-ci induisait, notamment par rapport à l’extension arbitraire du filtrage. Dans une lettre adressée à d’autres FAI, la BAF menace d’entamer des procédures judiciaires si le blocage n’est pas généralisé.
Nous nous sommes procurés le document adressé par la BAF 12:
C’est une pratique courante des lobbies des industries du divertissement que de s’exprimer en omettant une nécessaire contextualisation des faits, voire en déformant la réalité 3. Ce courrier affirme :
« A cette fin, la BAF serait en droit d’agir en justice contre votre société, en sa qualité de fournisseur d’accès à Internet. Elle n’éprouverait aucune difficulté à obtenir l’injonction recherchée, au vu de la décision déjà intervenue. »
Cette déclaration ne tient pas compte de l’avis rendu par l’avocat général de la Cour de justice de l’Union européenne le 14 avril 2011 qui, dans le cadre de l’affaire SABAM contre Scarlet, indiquait que des mesures de filtrage ou de blocage portent atteinte aux droits fondamentaux. Cet avis a été confirmé par la Cour quelques jours après l’envoi de la lettre aux FAI.
La BAF omet sciemment de préciser que toute limitation de l’exercice des droits et libertés reconnus par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne doit être prévue par la loi et respecter lesdits droits et libertés.
Entre-temps, l’opérateur BASE semble avoir cédé au chantage et pratique désormais un blocage des domaines associés au site « The Pirate Bay », sans que celui-ci soit motivé par une quelconque décision judiciaire. Notons que ce blocage a également des répercussions sur les opérateurs virtuels utilisant les réseaux de Base, dont Mobile Vikings, Allo RTL et JIM Mobile.
« Ces pratiques de censure, qui sont tantôt justifiées par un préjudice factice, tantôt imposées par un chantage douteux, rappellent une fois encore l’urgence de légiférer sur la neutralité du Net afin d’établir un cadre juridique assurant une juste protection des droits fondamentaux sur Internet. » déclare André LOCONTE, porte-parole de la NURPA.
L’association citoyenne de défense des droits des internautes se tient à la disposition des députés fédéraux pour contribuer au débat relatif aux propositions de loi déposées en ce sens à la Chambre des représentants.
Références
1 : Lettre de la Belgian Anti-piracy Federation à certains FAI en français
2 : Lettre de la Belgian Anti-piracy Federation à certains FAI en néerlandais
3 : allant jusqu’à signer des pétitions au nom de personnes mortes ou non-consentantes (voir Liste Eurocinéma)